Logement décent : définition, critÚres et jurisprudence

Actualisé le
min de lecture

ModÚle d'état des lieuxTéléchargez un modÚle gratuit d'état des lieux pour vous assurer de la décence de votre logement. ModÚle actualisé 2024 - Loi Alur.
Je télécharge PDF

Avant de pouvoir louer son bien immobilier, il est nĂ©cessaire pour le propriĂ©taire de s’assurer qu’il est en bon Ă©tat et peut ĂȘtre mis sur le marchĂ© sans risque pour son futur locataire. En effet, le logement doit ĂȘtre considĂ©rĂ© comme dĂ©cent lors de la remise des clĂ©s au locataire et le rester tout au long de la location. Dans le cas contraire, son nouvel occupant est en droit de se retourner contre son bailleur.

Qu’est-ce qui dĂ©finit un logement dĂ©cent ?

logement indécent définition

La location d’un logement est encadrĂ©e par plusieurs lois et dĂ©crets, dont la loi du 6 juillet 1989 sur les rapports locatifs. Cex textes donnent une liste de critĂšres stricts qui servent Ă  dĂ©finir la notion de logement dĂ©cent :

Définition d'un logement décent

La liste des critĂšres Ă  respecter Ă©tablie en 2002 par dĂ©cret a pour but de statuer plus facilement sur la dĂ©cence ou non d’un logement. Pour qu’un logement puisse ĂȘtre considĂ©rĂ© comme dĂ©cent, il ne doit pas porter atteinte Ă  la sĂ©curitĂ© physique ou Ă  la santĂ© de son occupant et doit lui assurer un minimum de confort. Il doit lui permettre de cuisiner, de se chauffer, d’avoir une hygiĂšne correcte ou encore d’avoir accĂšs Ă  la lumiĂšre du jour. Il est bon de savoir que les logements conventionnĂ©s APL et ANAH sont tous des logements dĂ©cents ; cela fait en effet partie des Ă©lĂ©ments qu’ils doivent rĂ©unir pour obtenir ce statut.

Ne pas confondre logement indĂ©cent et logement insalubre L’état de dĂ©gradation du logement insalubre est bien plus avancĂ© et peut directement impacter la santĂ© ou la sĂ©curitĂ© de ses occupants, voire des voisins. Les potentielles sanctions sont donc plus importantes dans le cas du logement insalubre.

Les critĂšres Ă  respecter

Voici la liste des critĂšres qu’un logement doit respecter pour ĂȘtre dĂ©cent :

critÚres logement indécent
  • Une taille minimum : 9m2 habitables et 2,20m de hauteur de plafond, soit 20m3 au minimum,
  • Une installation Ă©lectrique et/ou gaz pour le chauffage et la cuisson en bon Ă©tat de fonctionnement (diagnostics Ă©lectricitĂ© et gaz Ă  jour),
  • Une cuisine ou coin cuisine amĂ©nagĂ© avec un Ă©vier,
  • AccĂšs Ă  l’eau potable avec un dĂ©bit et une pression suffisants,
  • Une douche ou baignoire avec accĂšs Ă  l’eau chaude et froide,
  • Des toilettes en bon Ă©tat de fonctionnement (dans le cas d’un studio, elles sont tolĂ©rĂ©es Ă  l’extĂ©rieur du logement Ă  condition d’ĂȘtre facilement accessibles),
  • Évacuation des eaux usĂ©es fonctionnelle,
  • PiĂšce principale Ă©clairĂ©e par la lumiĂšre naturelle,
  • Absence de plomb ou d’amiante dans tout le logement,
  • Un nombre normal d’occupants en comparaison de la taille du logement,
  • Depuis 2017 et le dĂ©cret sur les performances Ă©nergĂ©tiques des logements : Ă©tanchĂ©itĂ© Ă  l’air et aĂ©ration correcte, dans le but de moins dĂ©penser en chauffage.

CritĂšres de dĂ©cence pour un logement meublĂ© Les critĂšres de dĂ©cence sont les mĂȘmes pour un logement meublĂ© ou vide. Cependant, il faut respecter des critĂšres supplĂ©mentaires pour pouvoir louer avec le statut meublĂ© (prĂ©sence de certains meubles prĂ©cis par exemple).

Qui peut constater l’indĂ©cence ou l’insalubritĂ© d’un logement ?

Plusieurs personnes sont habilitĂ©es Ă  constater l’indĂ©cence d’un logement. Ils peuvent ĂȘtre appelĂ©s pour un simple diagnostic ou dans le cadre d’une procĂ©dure visant Ă  reconnaĂźtre la non dĂ©cence et condamner (le cas Ă©chĂ©ant) le propriĂ©taire.

  • Les experts mandatĂ©s par les compagnies d’assurance, dont le rapport d’expertise est rĂ©guliĂšrement utilisĂ© comme preuve lors de procĂšs. C’est gĂ©nĂ©ralement eux qui sont appelĂ©s lorsque le sinistre se limite Ă  l’indĂ©cence.
  • Un huissier de justice peut Ă©galement remplir un rĂŽle similaire. Cependant, il reste un magistrat en premier lieu et son analyse est donc plus facilement contestable que celle d’un expert ou d’une commission spĂ©cialisĂ©e.
  • Il est possible de faire appel Ă  la Caf pour constater la dĂ©cence ou non d’un logement.

Dans le cas d’un logement insalubre, il faut passer par la mairie qui mandatera le Service Communal d'HygiĂšne et de SantĂ© (SCHS). Leurs agents se dĂ©placeront pour constater l’étendue des dĂ©gĂąts ou enverront ceux d'une Agence RĂ©gionale de SantĂ© (ARS). Il est Ă©galement envisageable de contacter la DDASS.

Locataires : quels sont les recours en cas de logement indécent ?

Un locataire se rendant compte que le logement qu’il occupe est indĂ©cent peut agir pour amĂ©liorer sa situation. Peu importe ce qui a Ă©tĂ© indiquĂ© sur l’état des lieux d’entrĂ©e, cela ne retire pas au bailleur son obligation de dĂ©livrer un logement dĂ©cent et qui le reste tout au long de la location. Le recours en cas de logement indĂ©cent se fait en 3 Ă©tapes :

recours logement indécent
  1. Dans un premier temps, le locataire doit contacter son bailleur afin de lui signaler les Ă©lĂ©ments d’indĂ©cence et de tenter d’arriver Ă  un accord Ă  l’amiable pour qu’il effectue les travaux nĂ©cessaires. Si le propriĂ©taire accepte, le locataire lui indique par lettre recommandĂ©e avec accusĂ© de rĂ©ception les amĂ©liorations Ă  faire et le dĂ©lai Ă  respecter.
  2. En cas de rĂ©ponse nĂ©gative ou d’absence de rĂ©ponse et aprĂšs un dĂ©lai de 2 mois, le locataire peut alors saisir la Commission DĂ©partementale de Conciliation (CDC) pour tenter d’arriver Ă  un accord. Bien que recommandĂ©e, cette Ă©tape reste facultative : il est possible de porter l'affaire immĂ©diatement devant un juge. Cette commission convoque les deux parties par courrier ou mail 15 jours avant la sĂ©ance au cours de laquelle elles exposeront les Ă©lĂ©ments dĂ©fendant leur point de vue. Chaque partie peut ĂȘtre prĂ©sente en personne ou se faire reprĂ©senter et peut ĂȘtre assistĂ©e par la personne de son choix. Si l’une est absente (sans motif valable) le jour de la sĂ©ance, alors la commission pourra simplement Ă©mettre un avis en se basant sur les informations donnĂ©es par la partie prĂ©sente. En cas d’accord, un document est signĂ© et les deux parties doivent s’engager Ă  le respecter. Si ce n’est pas le cas, la partie spoliĂ©e peut alors saisir le tribunal pour y remĂ©dier.
  3. En cas de nouveau dĂ©saccord, les deux parties peuvent faire appel Ă  un tribunal. Chacune devra alors prouver la dĂ©cence ou non du logement via des photos, rapports d’experts ou encore des courriers Ă©changĂ©s. Si le logement est reconnu comme indĂ©cent, le propriĂ©taire pourra ĂȘtre condamnĂ© Ă  effectuer les travaux nĂ©cessaires pour arranger la situation mais Ă©galement Ă  baisser le loyer demandĂ© et Ă  payer des dommages et intĂ©rĂȘts Ă  son locataire.

A noter que la marche à suivre est différente en cas de logement insalubre.

Que faire en cas de logement insalubre ?

Un locataire vivant dans un logement dĂ©clarĂ© indĂ©cent peut bĂ©nĂ©ficier d’aides de la Caf selon certaines conditions.

Habiter un logement indĂ©cent ne dispense pas le locataire de payer son loyer, exceptĂ© si l’état du lieu le rend inhabitable. Il revient alors au locataire la tĂąche de prouver que sa cessation de paiement est justifiĂ©e.

Propriétaires : que faire en cas de logement indécent ?

En cas de logement indĂ©cent, le propriĂ©taire doit le rĂ©nover avant que le locataire ne l’occupe ; dans le cas contraire, et mĂȘme si des travaux sont prĂ©vus Ă  court terme ou que le locataire a donnĂ© son accord Ă©crit, ce dernier peut se retourner contre le bailleur et exiger, entre autres, des dommages et intĂ©rĂȘts.

  • Si le locataire se plaint de l’indĂ©cence du logement :

    DĂšs qu’il en est informĂ©, le propriĂ©taire a l’obligation d’effectuer les travaux nĂ©cessaires pour Ă©viter Ă  son locataire de souffrir d’un trouble de jouissance. Le bailleur doit ĂȘtre contactĂ© par lettre recommandĂ©e avec accusĂ© de rĂ©ception pour que la requĂȘte ait une valeur juridique.

  • Si le propriĂ©taire ne reconnaĂźt pas l’indĂ©cence du logement :

    S’il ne reconnaĂźt pas la lĂ©gitimitĂ© des allĂ©gations de l’occupant, il peut saisir lui aussi la Commission DĂ©partementale de Conciliation, voire le tribunal.

  • Si le propriĂ©taire dĂ©couvre lui-mĂȘme l’indĂ©cence :

    Si le propriĂ©taire remarque de lui-mĂȘme que son logement, occupĂ© ou non, est indĂ©cent, il a tout intĂ©rĂȘt Ă  prendre les dispositions nĂ©cessaires pour y remĂ©dier. Cela afin de pouvoir le louer dans de bonnes conditions de nouveau, mais Ă©galement pour Ă©viter qu’il ne devienne insalubre.

  • En cas d’insalubritĂ© :

    Toute personne remarquant l’insalubritĂ© des lieux peut contacter la mairie pour signaler cet Ă©tat. Le propriĂ©taire risque alors de lourdes sanctions financiĂšres, voire une peine de prison s'il refuse de reloger son potentiel locataire ou d’effectuer les travaux dans les dĂ©lais, entre autres circonstances aggravantes.

Que dit la jurisprudence ?

De nombreux cas liĂ©s Ă  un logement prĂ©tendument indĂ©cent font jurisprudence. Les jugements peuvent aussi bien ĂȘtre en faveur du propriĂ©taire que du locataire, voire donner raison aux deux parties sur des points diffĂ©rents. Il n’y a pas de sanctions ou d’amendes prĂ©cises, chaque verdict est rendu au cas par cas pour rĂ©parer au mieux les prĂ©judices subis. Voici deux exemples de jugements opposant un couple de bailleurs Ă  un couple de locataires.

Cas d'une condamnation du bailleur

Dans l’affaire n° 16/02354, verdict rendu le 16 juin 2017 par la Cour d’Appel de Reims, les Ă©poux X, les bailleurs, font d’appel d’une premiĂšre dĂ©cision en faveur des consorts A et Z, leurs locataires. Ces derniers leur reprochent de ne pas avoir fait de travaux suffisants pour rĂ©gler les problĂšmes d’humiditĂ© dans leur logement. Le rapport d’expertise liĂ© Ă  ce jugement conclut : Le logement souffre d’un manque de ventilation et d’isolant thermique, entraĂźnant fatalement un phĂ©nomĂšne de condensation sur les parois froides. Ces dĂ©fauts ne sont pas la consĂ©quence d’un dĂ©faut d’usage par le locataire mais sont liĂ©s Ă  l’architecture du logement et Ă  ses Ă©quipements techniques inadaptĂ©s.

CA Reims, 1re ch. sect. inst, 16 juin 2017, n° 16/02354. Lire en ligne

La cour d’appel confirme le jugement rendu en premiĂšre instance. Bien que des travaux aient Ă©tĂ© effectuĂ©s, ils n’ont pas Ă©tĂ© suffisants pour rĂ©gler les problĂšmes d’humiditĂ© et donc de dĂ©cence du logement. Le jugement est partiellement infirmĂ© et les Ă©poux X sont ainsi condamnĂ©s Ă  verser Ă  leurs locataires :

Cas d'une condamnation des deux parties

Certains jugements sont moins tranchĂ©s et imputent des fautes aux deux parties. C’est le cas du verdict n° 15/05271 rendu le 28 septembre 2017 par la Cour d’Appel de Douai.

condamnation pour logement indécent

Le couple YZ loue Ă  M. X (qui vit avec Mme. A) un logement ainsi qu’un garage. Les locataires cessent de payer leurs loyers au bout d’un certain temps avant de partir dĂ©finitivement et d’attaquer le couple YZ en justice en demandant des dommages et intĂ©rĂȘts. Le logement s’avĂšre ĂȘtre effectivement indĂ©cent en de multiples aspects et les bailleurs sont condamnĂ©s (entre autres) Ă  verser 4600€ de dommages-intĂ©rĂȘts au couple XA.

En revanche, les locataires sont jugĂ©s fautifs d’avoir cessĂ© de verser aux bailleurs leur loyer alors qu’aucun jugement en ce sens n’avait Ă©tĂ© rendu et que le logement n’était pas inhabitable. Ils ont donc Ă©tĂ© condamnĂ© Ă  payer la majeure partie de leurs loyers en retard, pour un montant de 3184,18€ ainsi que 200€ de dommages-intĂ©rĂȘts. AprĂšs compensation, le couple YZ a donc dĂ» verser 1922,82€ au couple XA.

Bailleurs comme locataires se doivent donc d’ĂȘtre prudents concernant l’état du logement en location. Une bonne analyse au moment de l’état des lieux peut Ă©viter certains dĂ©sagrĂ©ments aux deux parties.